Sentences du Shaykh Abu-l-Qasim Junayd al Baghdadi
Sentences du Shaykh Abu-l-Qasim Junayd al Baghdadi (qu’Allâh lui fasse miséricorde)
Quatre cents docteurs ont demandé en quoi consiste l’action de grâces, il répondit :
« Elle consiste à ne pas consommer dans l’insouciance les biens que nous a dispensés le Seigneur Très Haut (- qu’Il soit exalté -) et à ne pas s’en faire une ressource pour se mettre en état de rébellion. »
Junayd disait :
« Dans cette route de la vie, il faut tenir de la main droite le Livre que nous a envoyé le Seigneur Très Haut (- qu’Il soit exalté -) et de la main gauche les préceptes traditionnels du Prophète (sallallâhu ‘alayhi wa salâm) attendu que celui qui marche à la lumière de ces deux lampes ne s’écartera jamais du bon chemin. »
Un ascète nommé Nasiri, se rendant du Jilân à la Kaabah, ne fut pas plus tôt arrivé à Baghdad qu’il voulut aller voir Junayd. Celui-ci lui dit : « Ô ascète ! Ton Aïeul ‘Ali (qu’Allâh l’agrée), l’émir des fidèles, frappait avec deux sabres : avec l’un il frappait les infidèles, avec l’autre il se frappait lui-même dans ses passions. Du quel de ces deux sabres comptes-tu te servir ? » En entendant ces paroles, l’ascète pleura amèrement et supplia Junayd de lui montrer la bonne voie. « Ton cœur, lui dit Junayd, est la maison du Seigneur Très Haut (- qu’Il soit exalté -) : garde-toi bien d’introduire dans cette maison un autre que Lui. »
Une autre fois, on lui demanda :
« En quoi consiste la condition de derviche et à quelles marques reconnaît-on celui-ci ? Quels sont les signes distinctifs de la résignation ? - Le derviche, répondit Junayd, est celui qui ne parle durement à qui que ce soit. Si quelqu’un lui adresse des paroles injurieuses, il reste impassible. Quant à celui qui pratique la résignation (ndT : at-tawakkul ou confiance absolue en Allâh), il doit avaler la potion amère des épreuves sans laisser voir la moindre contraction sur sa figure et sans faire entendre la plus légère plainte. »
Il disait encore :
« Il vaut mieux pour un homme vertueux avoir des relations avec un débauché qu’avec celui qui sait le Coran par cœur et qui est malfaisant. »
On lui demandait :
« Qui de nous tous est plus digne de considération ? - C’est celui qui se soumet de bonne volonté aux arrêts du Seigneur, répondit-il. - Et avec qui faut-il entretenir des relations ? - Avec ceux-là qui, quand ils vous font du bien, l’oublient d’eux-mêmes et ne vous le reprochent point. - Et quelle est la voie qui conduit au Seigneur Très Haut ? - Si vous renoncez au monde, vous trouverez forcément cette voie ; si vous rejetez les convoitises de votre personne sensuelle, vous arriverez nécessairement au Seigneur Très Haut. »
« Mais, lui disait-on encore, tu prétends que trois choses forment un obstacle dans la voie du Seigneur : les jouissances de ce monde, la fréquentation des hommes, les appétits sensuels. - Effectivement, répondit Junayd, ce sont là des obstacles pour le commun des fidèles ; mais pour l’élite il y en a trois autres : l’estime qu’on a pour ses actes religieux ; l’attention accordée aux miracles que l’on opère ; la présomption, par suite de laquelle on estime soi-même les récompenses qu’ont croit avoir méritées. »
Lorsque Junayd fut arrivé à ses dernières heures, il cria d’une voix imposante : « Au nom d’Allâh le Miséricordieux ! » puis il ferma les yeux et rendit l’âme. Un personnage nommé Hariri, qui le vit en songe, l’ayant questionné sur son sort, reçut de lui cette réponse : « Parce que je me levais la nuit pour une prière de deux rak’at, le Seigneur Très Haut m’a fait miséricorde. » Voilà ce qui fut révélé à Hariri dans son rêve.
Qu’Allâh nous accorde une sagesse et une science comparable à celle de Junayd. Qu’Il lui accorde sa miséricorde et augmente son degré ainsi que le nôtre.
Amîn.